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S’il est une fonction qui fait couler beaucoup d’encre dans la sphère RH, DG et marketing, c’est bien celle de Directeur de l’Expérience Client (CXO – Customer Experience Officer). En 4 ou 5 ans, elle est devenue l’une des pièces maîtresses des réorganisations d’entreprise et le signe que celle-ci base toute sa stratégie sur le centrage client (customer centricity). La variété des missions associées laisse à penser qu’elle n’est pas encore arrivée à maturité et que les contours restent encore à préciser.

Que peut-on attendre d’un directeur de l’expérience client ?

Si on s’en remet à la définition de l’expérience client, une telle fonction suppose d’avoir une vision hélicoptère sur tous les points de contact susceptibles de générer de l’émotion lors des interactions client, avant, pendant et après l’achat. Ces interactions surviennent avec les salariés de l’entreprise, les points de ventes, les sites internet, les produits, les applications, les objets connectés, etc. Forcément rattaché à la direction générale, il a pour rôle principal de faire évoluer l’état d’esprit de l’entreprise et pas seulement de mettre en place des process et des outils. Compte-tenu de la transversalité inhérente à la fonction, il aura besoin de l’appui et de la confiance de l’ensemble du comité de direction.

Comment les entreprises transposent la fonction expérience client dans l’organisation ?

Les directeurs de l’expérience client que j’ai été amenée à rencontrer ne cochent jamais toutes les cases de la fonction. Certains se concentrent sur l’expérience client digitale, en intégrant toute la chaîne de contacts issue du digital mais en omettant toutes les autres. Du fait de sa complexité, la génération de l’expérience client est souvent divisée entre les équipes techniques, les équipes marketing et les équipes satisfaction client et qualité. Chacune de ces équipes a un rôle clé à jouer pour délivrer une expérience globale positive.
Dans d’autres entreprises, le directeur expérience client se concentre seulement sur un des piliers de l’expérience client : les interactions avec les salariés (du service client, du service gestion, du service commercial). Il touche rarement aux deux autres piliers : la création de valeur, la confiance et l’engagement vis à vis de la marque.

La mesure de la satisfaction est un levier majeur de l’amélioration de l’expérience

Gérer la satisfaction sur tous les points de contact web, plateforme partenaire, plateforme de commande nécessite la mise en place d’outils de mesure et un lien étroit avec les équipes de vente. Le scoring des leads, en effectuant un repérage par niveau d’intérêt, va permettre de pousser les bons contenus aux personnes intéressées et de les orienter vers les équipes adéquates. Ainsi, surtout dans les grands groupes, on répartit les leads par canal de distribution (vente directe ou indirecte). Les ventes s’en trouvent accélérées et les clients satisfaits par la facilité et la fluidité dans le parcours.
Pour obtenir un effet booster sur les équipes, la DG doit intégrer dans son tableau de bord mensuel les indicateurs de la satisfaction du type NPS (1), CES (2). Pas de progression de la démarche d’expérience sans pilotage au plus haut niveau.

Quel est le portrait du directeur de l’expérience client du futur ?

Il est familier de la digitalisation, facteur essentiel de l’amélioration de l’expérience sur plusieurs dimensions : accessibilité, clarté, fiabilité, réactivité, facilité. Il place le contact humain au cœur de ses préoccupations car les émotions ne sont jamais plus fortes que lors de rencontres face à face. Il est l’incarnation du « phygital » (fusion des activités physiques et digitales) et de la pensée SDL (Service Dominant Logic)(3), qui présente la valeur comme le résultat d’une interaction entre les clients, les collaborateurs, les partenaires de l’entreprise. Il privilégie les démarches agiles et se fait l’apôtre de la culture client en interne.

Nommer un CXO dans une organisation est un choix encore peu répandu dans les entreprises. Il suppose d’accepter une refonte profonde de l’organisation et la conduite du changement qui l’accompagne. Pas de doute que la fonction évoluera au fur et à mesure de son adoption et de l’entrée des entreprises dans l’économie de l’expérience (4).

(1) Net Promoter Score : mesure la propension à recommander l’entreprise et ses produits, services
(2)
Customer Effort Score : mesure les points de souffrance dans une relation
(3) voir les travaux de Vargo et Lusch (2004) sur un nouveau modèle de pensée allant du GDL (Goods-Dominant Logic) au SDL (Service-Dominant Logic)
(4) The Experience Economy, Joseph Pine et James Gilmore, HBR, 2011